La naissance d'un menu

La naissance d'un menu

TEXTE ÉCRIT PAR ÉMILIE VILLENEUVE - Oenopole

 

Vous êtes-vous déjà demandé quel brillant esprit était capable de créer un plat de A à Z ? Mieux, par quels circuits neuronaux émergeait un menu entièrement inspiré du vin ? Œnopole s’est transformé en petit oiseau et on a épié le brainstorm de la géniale équipe de Menu Extra. En quel honneur ? Les cooks les plus cool en ville s’apprêtent à recevoir le génialissime vigneron Julien Labet dans le cadre de Montréal en Lumière.

 

UNE PREMIÈRE

C’est un matin de verglas sur le boulevard Saint-Laurent. Il est 8 h 30 et derrière la devanture vitrée, les verres sont parfaitement alignés sur la table où trônent aussi les crachoirs (Dieu merci). Les copropriétaires du projet Menu Extra, Alexis Demers, Francis Blais et Camilo Lapointe-Nascimento sont réunis pour esquisser les premiers traits d’un menu dégustation entièrement dédié aux vins du Domaine Labet.

Scoop : C’est la première fois en 23 ans d’existence que le festival Montréal en Lumière accueille un vigneron !

DES QUILLES DE LÉGENDE D’OÙ EXPLOSENT DES ARÔMES ENVOÛTANTS, QU’EST-CE QU’ON MANGE AVEC ÇA ? VOILÀ UN BEAU DÉFI POUR LES PRODIGES DE MENU EXTRA.

AU GOÛT DU CHEF

 

AU GOÛT DU CHEF

L’homme en question, c’est Julien Labet. Son nom se dit comme on embrasse et ses vins émeuvent inévitablement. C’est que le Jurassien qui travaille naturellement de la vigne au chai fait des quilles de légende d’où explosent des arômes envoûtants. Tellement qu’on voudrait méditer au-dessus du verre des heures durant. Or, dès qu’on porte les lèvres à la coupe, les pH bas et la magnifique acidité appellent une immense soif. Qu’est-ce qu’on mange avec ça ? Voilà un beau défi pour les prodiges de Menu Extra.

Les palais sont frais et dispos pour la première gorgée de Bajocien 2019. La fébrilité est palpable dès la première gorgée. Francis dit : « Ça sent le creamsicle ! » Oui ! Il y a cette toute légère impression de bois d’élevage et avec elle flotte un parfum éthéré de fève tonka. Les gars s’animent et se relancent sur l’idée de commencer sur une bouchée grasse… Un peu de friture peut-être ? « J’ai une émotion de champagne… Je pense caviar », laisse tomber Camilo, les yeux fermés, le nez dans le chardo.

On passe à Lias 2019 (toujours du chardonnay). Ça caresse en même temps que ça saisit. C’est vif, tranchant et ça se termine sur une salinité chatouillante. Et puis c’est long, si long. Ce plaisir qui dure inspire peut-être les pétoncles. En tout cas, Alexis parle de cet hypothétique accord en évoquant davantage les textures que les goûts, en notant tout de même le côté acidulé du vin : « J’ai du fruit à noyau immature et un peu d’herbe verte… »

 

 PINCEZ-MOI, JE RÊVE

C’est fascinant de voir les trois comparses en pleine séance de création. Par exemple, le Poulsard 2020, ultra floral et séduisant, appelle selon eux d’office la délicatesse de la viande crue. Mais Camilo et Francis se relancent sur l’assaisonnement : il ne faudrait pas tuer l’amour à force d’aromates trop puissants. Le pinot noir les Varrons sur 2020, avec ses tanins si soyeux qu’ils donnent un peu envie de pleurer (de joie), invite le petit gibier dans la conversation. Lièvre ? Caille ? Pigeon ? Francis insiste : « Il faut une cuisson douce pour ne pas perdre le côté aérien du vin. »

Il reste trois vins. Les idées foisonnent jusqu’au milieu de l’avant-midi. On sent d’ailleurs que ça ira bien au-delà. Plus tard, les gars dégusteront avec le restant de l’équipe. Dans quelques jours, Julien Labet sera au bout du fil et Alexis, Francis et Camilo déballeront tous leurs secrets au vigneron qui, on le sait déjà, est emballé par le projet. Ensemble, ils donneront les derniers coups de pinceau à l’œuvre.

Du menu imprimé, les délices vont se matérialiser. Ne manquera que l’ultime test des goûteurs venus se faire ravir les sens et rencontrer Julien lors de l’une des quatre soirées de l’évènement, en février : le rêve devenu réalité. 

PINCEZ-MOI, JE RÊVE

 

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